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Beat'em All : Papy fait de la résistance

Emblématique de l’ère arcade, le Beat Them All cherche aujourd'hui un second souffle. A l'heure de l'émulation et des crédits infinis, des studios s’emploient à re-donner un intérêt au genre et à taper plus haut que dans la simple nostalgie pour raviver l’héritage des héros de Metro City.

Mother Russia Bleeds est un brawler du studio français Le Cartel sorti fin 2016. Ici, le gameplay est avant tout un outil au service de l’univers du jeu, dans lequel on ne se verrait pas évoluer autrement qu’en martelant des boutons pour écraser des faces. Non pas que Streets Of Rage aurait pu être un point’n’click, mais pas mal d’indices mettent en évidence le boulot accompli pour que le jeu n’ait pas juste l’air d’un beat'em all de plus dont on aurait simplement changé les assets graphiques.

Le principal argument de Mother Russia Bleeds, c’est l’atmosphère qu’il instaure et qu’il arrive à maintenir de bout en bout. Le jeu est une quête de vengeance sur fond de révolution dans une URSS uchronique, sombre et violente à souhait. La violence, c’est d’ailleurs le cœur du jeu et chaque élément vient le rappeler, de la musique synthwave agressive au pixel art savamment maîtrisé qui dépeint un monde couleur sang et vomi, sans concession.

Jusqu’au-boutiste, le jeu ne se prive pas de multiplier les animations gores, les exécutions bourrines, et des moyens toujours plus barrés d’éclater des gueules. La mise en scène vient elle aussi appuyer un gameplay classique mais solide, et quelques situations arrivent à créer une tension qui donne du cœur à l’ouvrage. C’est le cas quand, en pleine baston sur une voie ferrée, on doit aveugler un boss à coups de flashbangs tout en évitant les trains qui nous arrivent dessus.

L’accent est également mis sur les feedbacks excessifs, manifestations sonores et visuelles de chaque pression sur un bouton. En cela le pari est quelque peu similaire à celui de l’excellent Shank, sorti en 2010 : ressentir la quête de vengeance du personnage qu’on incarne. Les rires satisfaits et décomplexés (voir un peu crétins) du joueur ne viennent finalement pas tant de la violence mise en scène que du déferlement de haine et de détermination auquel on participe.

Fight’N Rage, sorti en septembre 2017, distribue les références dans une ambiance plus bon enfant. De Double Dragon à Vewtiful Joe en passant par Kickboxer (le film avec Jean-Claude Van Damme), on prend plaisir à croiser la route d’Attary le jaguar ou encore des frangins Seaven et Stegal.

Le jeu renoue avec un bon vieux trio brute/ninja/femme fatale et un gameplay 3 boutons à toute épreuve (saut, coup et spécial) qu’on a vite fait d’enchaîner pour sortir des combos aussi efficaces que gratifiants. Ajoutez un parry et le système de jeu au premier abord simpliste se révèle rapidement plus complexe et profond qu’il en a l’air. Au fur et à mesure des essais et des défaites, on débloque des indices sur les possibilités de combat, puis un mode entraînement qui propose plusieurs défis par personnages et dévoile un système de combos bien rôdé qui donne envie d’y retourner.

Le jeu hurle également son amour des années 90 à travers un filtre CRT bien baveux, des couleurs néon/flashy à mi-chemin entre Comix Zone et Hotline Miami ainsi qu’une BO pleine de solos de guitare criards (mais aussi plein de thèmes tout à fait supportables et même parfois très bons). Et bien sur, une science exacte de l’animation pour donner vie à des sprites qui n’auraient pas fait tâche sur Neo-Geo Pocket.

Au-delà de l’hommage à l’arcade, Fight’N Rage est conscient de son support et récompense le joueur pour sa persévérance : à chaque Game Over le score accumulé est transformé en jetons qu’on peut dépenser pour acheter beaucoup de contenu. Tellement qu’on ne sait même plus quoi en faire, mais chercher à tout débloquer est un excellent prétexte pour aller se briser les dents le long de 8 niveaux, plusieurs routes alternatives et autant de fins différentes. Tout en étant fidèle à ses racines le jeu est riche, particulièrement généreux et c’est d’autant plus impressionnant qu’il a été développé par un seul homme, sur son temps libre et pendant plus de 3 ans.

Pour pousser encore plus loin dans le culte du retro, c’est maintenant Paprium qu’on attend au tournant puisque le jeu se paie même le luxe de sortir sur Megadrive, au format cartouche : old-school jusqu’au bout des ongles. L’année 2018 devrait également voir arriver des titres plus expérimentaux. Way Of The Passive Fist par exemple, qui prend le parti de ne proposer aucun bouton d’attaque. Armé d’un dash et d’un parry, il s’agit avant tout de se faire au timing des coups ennemis pour pouvoir contre-attaquer. Shattered Realms, à l’inverse, intègre un système de jeu de baston complet avec normaux, spéciaux, supers et même des romans cancels façon Guilty Gear (une très chouette interview à propos de ce mélange des genres est à lire ici popup: yes).

Autant dire que la flamme du beat’em all brûle toujours, et qu’une infinité de Continue ne sera pas de trop pour continuer à rendre justice à la force de nos poings.

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